Tuesday, July 14, 2015

"Bastille" par Jean Gentil (Le Louisianais - 17 Juillet 1869)

Le quatorze juillet, quatre-vingt neuf, Louis seize
Régnant, mangeant, priant,
Le peuple de Paris, qui vivait moins à l'aise,
Etant un mendiant,
 
Se leva comme un homme. Il était la colère
Frémissante et sans peur,
Le laid deshérité du haillon populaire,
L'être qui fait stupeur.
 
Et comme la Bastille était ombre à la France
Et crime sur Paris,
Il démolit le monstre en chantant l'espérance
Près des canons surprise.
 
Ce fut l'oeuvre d'un jour et l'ère des grandes choses,
Le fier commencement
Où le peuple et les rois, en séparant leurs causes,
Ont un rugissement.
 
Du quatorze juillet surgit la république,
C'est-à-dire le droit,
La liberté, la vie au ciel domestique,
Un peuple moins un roi.
 
Les combattants d'alors furent de nobles âmes,
De beaux déguenillés;
Aux gueules des conons il éteignaient les flammes,
Fiers d'être mitraillés.
 
Maillard en était un. Mais les fils sont des filles,
Des homes en jupons;
Ils boivent des sorbets, ils dansent des quadrilles
Sur un air de "chapons."
 
Des argousins puants, crasseux, armés de triques,
Les poussent devant eux
Comme un naif troupeau d'innocentes bourriques...
Bastille, c'est honteux!