Sunday, February 5, 2017

"Un Lock" par Jean Gentil (Le Louisianais - 5 Octobre 1867)

Et mon âme était triste ainsi qu'une élégie
De poète incompris,
Triste comme un bouquin où ta théologie
Endort les grands esprits.

Chaque homme a de ces jours, de ces quarts d'heures sombres
Où l'on voudrait finir,
Où l'on éprouve en soi l'envahissement d'ombres
De ceux qui vont mourir.

Le coeur ne dit plus rien, l'amour est une chose
Sans la moindre saveur,
Et vous prisez autant le chardon que la rose,
Le beau que la laideur.

Une femme, une vierge, une beauté suprême
Arriverait des cieux,
Vous ouvrirait ses bras, murmurerait: "je t'aime"...
Vous fermeriez les yeux,

Vous tourneriez le dos, comme une vielle bête,
Au bonjeur des élus,
Sans comprendre que Dieu vous préparait la fête
Des plaisirs absolus.

Vous êtes un crétin!... Et tous tant que nous sommes,
Nous avons de ces jours,
Où,poètes, savants, femmes et gentilshommes
Ont leurs coeurs trois fois gourds.

Or donc, mon cher confrère,
J'ai bu du vin clairet
Comme on n'en trouve guère
Au fond d'un cabaret.

J'en ai bu jusqu'aux lèvres,
Pentant tout un grand jour:
Ca m'a chassé le fièvres
Et ramené l'amour.

C'était un Bourgogne,
Du pays de Dumez,
Qui vous rougit la trogne
Et qu'on aime ... à jamais.

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