Tuesday, February 17, 2015

"Journal" par Jean Gentil (Le Louisianais - 12 Juin 1869)

L'allumette chimique,
Qui prends à volonté,
N'est pas du tout comique,
Et c'est bien inventé.

Le cirage lui-même
Est un fameux poncif
Pour la botte suprême,
Ou le soulier massif.

Et les mille protiges
En temps de carnival?
Et le puissants quadriges
Qui roulent sans cheval?

Et le ballon qui vole
Dans les cieux étonnés,
Devant l'homme frivole
Qui relève le nez?

Mais le progrès splendide,
Sans nom, phénoménal,
C'est le chiffron sordide
Qui devient un "Journal"

On y voit des idées,
Des tableaux, des couleurs,
Des filles peu fardées,
Des romans et des fleurs.

La grande politique
Y montre ses crochets,
Et l'homme de boutique
Y tend ses trébuchets.

C'est tout un repertoire
De morts et de vivants,
Une superbe histoire
De chiens et de savants.

Et pour peu qu'il imprime
En "Pica" votre nom,
Vous lui donnez la prime
De gloire et de renom.

Quels beaux rêves d'une heure,
Et quelle volupté!
Votre âme rit et pleure
Dans un monde enchanté.

Après, lorsque la feuille
A passé(e) sous mon nez,
Je la prends, je l'effeuille
Dans le grand trou punais.

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