Wednesday, February 18, 2015

"Rien" par Jean Gentil (Le Louisianais - 19 Juin 1869)

Un doux rêveur, poete au bleu mystère,
Aux longs cils sur les yeux,
Aux étoiles dans l'âme, inconnu de la terre
Et bien connu des cieux.
 
Etait assis sur l'herbe... Avril, le mois des roses,
Des parfums, des rayons,
Lui jetait à l'esprit les merveilleuses choses
Des lointains horizons.
 
Il vivait loin du temps et des mondes visibles,
En dehors du fini;
Il écoutait  sans doute  aux spheres invisibles
L'accord de l'infini.
 
Le poete est ainsi. Rêver est son ivresse,
Et nul ne dira bien
Tout ce qu'il est d'amour, de Bonheur, de tendresse,
A ne penser à rien.
 
Ce rien, ô bon bourgeois de la bonneterie,
Te faire rire, parbleu!
Et tu ne comprends pas qu'on cherche une patrie
Là-haut, dans le ciel bleu.
 
Mais ce rien, c'est un Tout. C'est l'âme avec des ailes,
C'est le coeur qui bondit,
C'est la foi qui remonte aux clartés éternelles,
C'est l'homme qui grandit.
 
Pendant que nous mordons aux succulents choses
D'un étrange milieu,
Le beau poete, lui, s'élance vers les causes,
Vers un rien, vers son Dieu.

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