Thursday, June 4, 2015

"Croyons" par Jean Gentil (Le Louisianais - 23 Novembre 1872)

Comédiens, pèlerins, papelards et protées,
Grande Confraternité de païens et d'athées,
Ne craindriez-vous point la colère de Dieu,
Et convient-il, messieurs, que cette farce ait lieu?
Le siècle ne veut pas semblable comédie,
Qu'un miracle divin soit fait à l'étourdie,
Et qu'un jeune Gascon, un berger, un marmot,
En gardant ses brebis, trouve un Dieu sous l'ormeau.
C'est blaspheme insensé! La Foi vivante et saine
Repousse avec dédain si pauvre mise en scène,
Lève un front rayonnant vers les splendides cieux,
Demande l'Eternel aux mondes radieux,
S'enivre d'infui, de clartés, de lumières,
Et souffle aux feux follets qui font peur aux chaumières.
Trouver Dieu dans un trou, tout près d'un grand fossé,
Ou caché sous le roc, n'est-ce pas insensé?
Découvrir Notre-Dame au fond d'une caverne,
Avec un jupon bleu, n'est-ce pas baliverne?
Converser avec eux, tout familièrement,
Et patois béarnais, n'est-ce pas fort charmant?
O Païens, est-ce là votre catholicisme?
Avons-nous donc brûlé les Dieux du paganisme?
Les Naïades, les Pans, les Satyres velus,
Les brunes Vellédras des Gaulois chevelus,
Les prêtresses de Sein,--l'Ile tant renommé,--
Et les Divinités des guerriers à framée,
Sans compter tous les Saints de la Légende d'or,
Reviennent-ils, Seigneur? Est-ce que l'esprit dort?
Et la France peut-elle, étant grande et première,
Etant fille de Dieu, fille ainée et lumière,
Etant la foi divine allumée au Saint Lieu,
Croire qu'un petit pâtre ait vu le nez de Dieu?

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