Friday, January 9, 2015

"Chicago" par Jean Gentil (Le Louisianais - 5 septembre 1868)

Saint Pierre s'ennuyait, le dos à la colonne 
grince le verrou:
Car depuis quinze jours il n'avait vu personne
Et réfélechissait prou

Personne de Paris et personne de Rome
Pas même un converti,
Pas même un vieux soldat saturé de rogomme
Et qui s'est repenti!

C'était un mauvais mois, -- un mois de Purgatoire
Et de lâches témoins.
Aussi Pierre était-il d'une humeur deux fois noire;
On le serait à moins.

Le plus grave portier aime un peu la causette,
A savoir ce qu'on dit,
A jaser politique, histoire, amour, risette,....
Et même un vendredi.

Dans le plus grand des Saints il reste un peu de l'homme;
Et c'est fort bien pensé
Tout au moins Saint-Thomas le prouve dans sa "Somme"
Par A, plus B, moins C.

Pan!....Pan, Pan!-- Qui va là? La porte s'entrebâille,
Puis roule sur ses gonds,
Et Saint Pierre aperçoit un sire à longue taille,
Qui descend des Wagons.

Notre quidam avait pantalon dans la botte,
Chique énorme à la dent,
Chapeau gris sur la nuque, et je crois qu'il vous rote
Au nez en regardant.

Et puis ce voyageur d'une étrange encolure,
D'un facies humain,
Portait superbement une arme à la ceinture,
Un "carpet-bag" en main.

-- D'où viens-tu? dit le Saint.--Chicago! répond l'homme
--Pas connais, pas connais,
Et je n'ai jamais vu sur la carte de Rome
Un nom aussi punais.

Et le républicain dut montrer à l'
apôtre
Un Atlas de Colton
.
--C'est bien, dit le portier; s'il en arrive un autre,
Ce sera le second.


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