Saturday, April 18, 2015

"Les Cloches" par Jean Gentil (Le Louisianais - 26 novembre 1870)

Cloches des quatre vents, ô grandes voix chrétiennes,
N'avez-vous point assez fait vibrer vos antiennes
De la tombe au berceau, de la joie aux douleurs?
Ce n'est pas que la cloche, en vibrant sur nos têtes,
Ait tort d'accompagner le concert de nos fêtes
Ou de pleurer sur nous quand nous versons de pleurs.

Voix d'en haut, c'est bien dit. Au baptême elle sonne,
Au long trépassement elle tinte et frissonne,
Au divin Angelus elle a des chants pieux,
Et nous aimons encor ses joyeuses volées
Sur le front attendri de nos vierges voilées,
Quand le prêtre prononce un Conjungo des cieux.

Mais quand la France en deuil a ses femmes qui pleurent,
Ses fils désespérés et ses hommes qui meurent,
Quand un Vandale impur l'assassine en bandit,
Quand l'arme fait défaut, quand le canon difforme
Doit lancer sa mitraille et son boulet énorme,
Quand il faut, Dieu-Seigneur, écraser le bandit,

Que font dans les clochers des hautes basiliques
Ces grands monstres d'airain aux gueules symboliques,
Ces hérauts que la terre a postés dans les cieux?
Qu'on jette à la fournaise, ô débonnaire,
La cloche qui sera le foudroyant tonnerre
D'un people punissant le crime audacieux.

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