Sunday, May 10, 2015

"Les Bandits" par Jean Gentil (Le Louisianais - 6 Mai 1871)

Vous les nommez brigands cruels, et misérables;
Vous affirmez qu'ils ont des projets exécrables,
Qu'ils sont voleurs, pillards et scélérats maudits,
Qu'il est juste et sensé d'égorger des bandits....
Et vous avez raison, car ils sont des sectaires,
Car ils ont des haillons, tous ces vils prolétaires.
Or, pour ces scélérats montrons nous sans merci.

Et cependants, messieurs, pourquoi sont-ils ainsi?
Est-ce donc par plaisir qu'on commet acte infâme,
Qu'on se souille le coeur et qu'on se flétrit l'âme?
Si ce n'est point plaisir, est-ce fatalité?
Et qui condamne-t-on, messieurs, en vérité,
Lorsque vous condamnez l'esclave miserable
Qui ne sait pas, ou bien le bandit exécrable
Qui sait trop. "Miserable" est le mot en effet;
Car dans toute misère il se trouve un forfait,
Car le crime remonte à toute cause sombre,
Car l'âme d'un bandit vit dans la nuit et l'ombre.
Ah! n'oublions jamais, lorsque jaillit le sang,
Que nul de nous ne peut se croire un innocent.
Et vous surtout, messieurs, vous qui menez les hommes,
Pourquoi nous condamner d'être ce que nous sommes?
Nourris de vos leçons, façonnés par vos mains,
Nous tombons dans le crime en suivant vos chemins
Si l'esclave est coupable et maltraite son maître,
C'est que le professeur est indigne de l'être.
L'Evangile de Dieu sait mieux la vérité:
Au-dessus des bourreaux il met la Charité.

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