Sunday, August 14, 2016

"Credo in Deum, V" par Jean Gentil (Le Louisianais - 29 septembre 1877)

Mais au Dieu qui condamne
L'homme pour un faux pas,
Et très souvent le damne,
Prêtre, je ne crois pas.

Un Dieu comme nous sommes,
Ayant nos passions,
Lançant contre les hommes
Ses malédictions,

Et qui devait connaître,
Bien avant qu'il m'eut fait
Volontairement naître,
Mon crime ou mon forfait,

N'est que l'affreux blasphème
D'un fol ou talapoin:
Et Dieu qui veut qu'on l'aime,
Aime et ne maudit point.

Nous créer comme un père,
Nous nommer ses enfants,
Dire à son fils: Espère
Vers les cieux triomphants--

Et puis jeter nos âmes
D'hommes, d'enfants en pleurs,
De viellards et de femmes
Dans l'enfer des douleurs,--

Dans l'enfer sombre gouffre,
Effroyable tourment,
Où le fils maudit sourire,
Souffre, éternellement?...

Non, non! C'est là mensonge
De pécheur affolé,
Ou mieux l'horrible songe
D'un esprit désolé.

Il est la Loi bénie
Des mondes radieux,
La grandeur infinie,
Du Miséricordieux.

Si son nom est Puissance,
Amour doit l'être aussi;
Mais il est par essence
La Suprême Merci.

Quand le malheur rapporte
Le prodigue au vieux toit,
Le père ouvre sa porte
Et dit: Fils, assieds-toi.

Et si le Démon, gnome
Monstreux, que l'on dit
Souverain d'un royaume
Eternel et maudit,

Lui volait, comme un traitre,
Sa fille au front charmant
Et son fils qui doit être
Son fils au firmament

Dieu poursuivrait l'informe
Monstre dans sa forêt,
Et, sans procès en forme,
Dûment l'étranglerait.

No comments: