Monday, August 15, 2016

"Dans Saturne, III" par Jean Gentil (Le Louisianais- 27 Octobre 1877)

Or, Saturne est énorme
Et vaste à contourner,
Comme aussi rond de forme,
Afin de mieux tourner.

Car les choses carrées,
Et lourdes, dans les airs
On plaines azurées,
Rouleraient de travers.

Et la forme bien faite,
Superbe, belle aux yeux,
Bonne aux sens, parfaite
Et grande dans les cieux,

Est la forme arrondie,--
Celle qu'on voit en haut,
Rayonnante, hardie,
Sublime et sans défaut.

Donc, Saturne est rond comme
Jupiter, Uranus,
Ou la tête d'un homme
Ou la belle Vénus.

Pour tourner sur lui-même,
Théologiquement,
Dans un ordre suprême,
Il lui fait seulement

Dix heures et demie,
Quand la Terre d'Adam,
En planète enformie
Et qui marche en boudant,

A des nuits prolongées,
Sa Lune, pas d'anneau,
Des bêtes abrégées
Et la forme d'un O.

Il a sept satellites
A sa discrétion,
Et qui sont des vélites
En observation.

Saturne est pâle et blème,
Dites-vous, à tel point
Que son obscur problème
Ne rayonne point,

Et qu'aux Observatoires,
A Berlin, à Paris,
On fait nombre d'histoires
Et beaucoup de paris

Sur la couleur des femmmes,
Des hommes, des moutons,
Des anges et des âmes
Aux saturniens cantons!

Il est même sur terre
Des gens comme Arago,
Qui vous diront: Mystère,
Tu credis, sed nego.

Car si Saturne est sphère,
Comme chacun l'a lu,
Sa morbide atmosphère
Manque de l'air voulu.

Il lui faut l'oxygène
Que nous avons ici,
L'azote ou nitrogène,
Et le carbone aussi.

Mais il vit trop dans l'ombre,
Trop noir, trop peu vermeil,
Trop lugubre, trop sombre
Et trop loin du soleil.

Et le soleil est l'âme
Des constellations,
L'esprit vivant, la flamme
Des incarnations.

Sans lui, sans Dieu, pas d'hommes,
Pas de fleurs, pas de jours,
Pas de ciel, point de pommes,
Et le néant toujours.

Le soleil est la vie,
La beauté, la grandeur,
L'âme fière et ravie
Dans l'immense splendeur..

Et les Guèbres peut-être,
L'adorant à genoux,
Le proclamant leur Maître,
Sont moins bêtes que nous."

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